A propos Anne-Béatrice Duparc

Activiste pour le RBI depuis 2009, membre du comité de BIEN-Suisse et de Génération RBI, coordination romande pour l'initiative Pour un revenu de base inconditionnel.

La grève des femmes et le revenu de base inconditionnel

A l’approche de la grève des femmes du 14 juin, je repense à la votation de 2016 sur le revenu de base et à la manière dont le Conseil Fédéral a méprisé les femmes : “plusieurs catégories de personnes n’auraient plus de raison financière d’exercer une activité lucrative, notamment les personnes qui gagnent moins de 2500 francs par mois ou à peine plus, c’est-à-dire les travailleurs à bas salaire ou à temps partiel, qui sont majoritairement des femmes.”

Ça vous a choqué autant que moi comme prise de position ? A l’époque ça n’a pas déclenché une grande ferveur féministe et je me demande encore pourquoi.

Le revenu de base est pour moi un projet féministe, car il favorise la reconnaissance du travail non rémunéré, donne la possibilité de refuser un travail dont les conditions ne nous conviennent pas et offre la liberté de choisir ses activités. Il affranchirait donc beaucoup de femmes (et d’hommes…) en permettant de faire évoluer leurs droits et transformer les rapports de force.

Pour le Conseil Fédéral, les travailleurs à bas salaires et à temps partiel sont majoritairement des femmes et c’est bien ainsi. De quel droit les 7 sages ont-ils pu émettre sur les femmes un avis aussi péremptoire et reléguer ainsi une grande partie de la population dans une sous-catégorie ne méritant pas le revenu de base ou un salaire décent ?

C’était aussi affirmer que toutes les femmes gagnant moins que 2500.- ne travaillent que pour des raisons financières. Travailler pour des raisons financières, la belle affaire! Qui n’a pas de loyers, d’assurance à payer, besoin de manger, se vêtir, se déplacer…? Mais comment peut-on dire qu’avec un revenu de base les femmes ne travailleraient plus? Comment ne pas reconnaitre que toute activité, quelle qu’elle soit, nous apporte autre chose que de l’argent ? Que dire de toutes celles qui pour mille raisons différentes aiment ce qu’elles font et ce qu’elles sont dans leur travail?

L’absence de contrainte économique ôterait aux femmes leur envie de se réaliser ? Et si c’était le contraire? Si le stress des fins de mois enfin relâchés permettait de contribuer de manière plus significative, plus libre et plus créative à la société? Si cette liberté retrouvée permettait de choisir librement son activité?

Les femmes, championnes du travail non rémunéré

Les femmes sont championnes du travail à temps partiel et aussi du travail non rémunéré lorsqu’il y a des enfants dans un ménage (selon l’OFS), tandis que les hommes pour la plupart travaillent à plein temps. C’est donc le temps partiel des femmes qui rend possible le plein temps des hommes, tel une sorte de subvention invisible. Elles sont aussi majoritairement celles qui s’occupent d’un parent âgé. Dans ces contextes, un revenu de base représenterait une valorisation et une reconnaissance de ce temps donné et indispensable au fonctionnement de la société, à son lien social et qui ne se traduit pas seulement en points de PIB, même si on sait que ces activités en sont le socle en rendant possible les autres activités économiques.

Cette inégalité dans les temps de travail rémunérés entre hommes et femmes se traduit en inégalité de revenus et se répercute également sur l’accès aux assurances sociales. Moins de cotisations = moins de chômage, moins de perte de gains, moins de retraite. Pour les femmes, la pénalisation ne s’arrête donc pas à 64 ans. Le montant de la retraite des femmes représente seulement 63% de celle des hommes et n’est souvent pas suffisante pour vivre. C’est interpellant. La contribution des femmes à la société vaudrait-elle globalement moins ? La femme devrait-elle encore s’envisager dans l’ombre financière de l’homme? Notre système d’assurance social a en effet été construit au sortir de la Seconde Guerre Mondiale autour d’un modèle du travail masculin, celui d’un homme qui gagne l’argent pour la famille et travaille à plein temps, sans interruption de carrière. C’est encore en fonction de cette norme, aujourd’hui totalement dépassée, que sont calculées les rentes de retraite aussi bien des hommes que des femmes. Le revenu de base est un élément qui peut contribuer à redessiner significativement ce modèle de protection sociale, afin qu’il soit plus adapté aux parcours de vie modernes. Il peut permettre d’assurer tout au long de la vie un socle de revenus pour aborder et traverser avec une sécurité financière les différentes phases de l’existence, les changements de situations personnels ou professionnels. Il peut autoriser des choix sereins pour les deux sexes, en terme de parentalité et de carrière professionnelle.

Le revenu de base donne le choix

Si le Conseil fédéral note que les bas salaires sont majoritairement féminins, il pourrait aussi avoir la noble intention non pas de cantonner les femmes dans ces bas salaires, mais de leur ouvrir des perspectives. C’est ce que propose un revenu de base en permettant de concilier mieux les différents temps et espaces de la vie que sont vie de famille, parcours de formation, vie professionnelle et temps libre. Loin de cantonner à la maison ou dans un bas salaire, le revenu de base donne la possibilité d’évoluer, de commencer ou de reprendre une formation. Il peut donner le temps et l’espace pour changer de cap, réaliser ses rêves, s’engager dans une nouvelle direction.

Dans quelques années, je le souhaite, on pourra entendre ce témoignage : “A partir du moment où j’ai eu mon revenu de base, j’ai pu arrêter de courir dans tous les sens, entre les enfants, le travail, les courses… J’ai pu enfin me poser et me demander ce que je voulais vraiment faire de ma vie. Et là, comme financièrement c’était possible, j’ai décidé de me lancer. J’ai toujours voulu être infirmière, mais comme j’ai dû commencé à travailler jeune, j’avais dû renoncer. Je me disais dans un coin de ma tête, plus tard peut-être, quand les enfants seront grands et qu’on aura besoin de moins d’argent pour faire bouillir la marmite… Et là (grand sourire) eh bien, j’ai enfin pu me lancer…!”

J’espère pouvoir demain entendre de multiples témoignages comme celui-ci. Il y a des femmes, des hommes, des humains, à qui le revenu de base peut donner de vrais choix. La grève des femmes du 14 juin est l’occasion de relancer la discussion sur la contribution d’un revenu de base à une société égalitaire.

Le RBi, ce n’est pas fini… !

La discussion ne fait que commencer…
Certains aimeraient que la discussion soit finie et que la votation du 5 juin sonne le glas du RBI en Suisse. Ils oublient, ou feignent d’oublier, que 23% de votes positifs pour une initiative qui a été lancée par des citoyens est un très bon résultat, alors que seuls les Verts et quelques sections du PS ont décidé de la soutenir dans la dernière ligne droite!

23%, c’est autant que le salaire minimum qui avait été lui porté il y a deux ans par l’ensemble du PS et par les syndicats! Un Suisse sur quatre a été prêt à soutenir le RBi, à accepter l’idée qu’en 2016 le rapport entre activité et revenu n’est plus une évidence et qu’il faut penser autrement la sécurité sociale du XXIème siècle. C’est un résultat d’autant plus impressionnant que la plupart des Suisses n’ont découvert l’idée du RBI qu’au cours des 3 derniers mois…

Donc oui, le débat continue. Car pour qu’une discussion comme celle qui a été lancée sur le RBi en Suisse s’arrête, il faudrait arrêter le cours de l’histoire, rétablir de force le plein-emploi, cryogéniser tous les militants dont la fibre citoyenne et politique s’est éveillée au cours de cette campagne et laver le cerveau de tous ceux qui ont encore envie d’y réfléchir. Il faudrait aussi décider que les discussions qui concernent l’avenir de notre société sont réservées uniquement aux appareils politiques et à notre parlement, pour qui majoritairement “Tout va bien”.

Qui a soutenu le RBI?
Les personnes de plus de 65 ans sont celles qui ont rejeté le plus massivement le RBI… C’est finalement rassurant, car il y a fort à parier que leur vision du marché de l’emploi ne coïncide pas avec la réalité actuelle et reste emprunte du doux parfum des 30 glorieuses, où on entrait dans une entreprise comme dans un mariage : pour la vie. Les jeunes entre 35 et 49 ans sont ceux qui ont le plus soutenu le RBI et 59% des moins de 35 ans pensent qu’ils verront un revenu de base au cours de leur existence (sondage Demoscope). Ils font partie de ces générations qui ont fait connaissance avec les activités multiples, les stages à répétition, la création d’activités indépendantes sans filet et la précarisation de leurs conditions de vie par rapport à la génération de leurs parents. 45% des chômeurs ont même plébiscité le RBI. Les cantons et les villes obtenant d’ailleurs les meilleurs résultats sont aussi ceux où le taux de chômage est le plus important.

23% de OUI, est-ce la victoire du NON?

Penser que c’est la victoire définitive du NON serait très réducteur. C’est ce qu’on est tenté de penser en restant dans une logique binaire où le OUI et le NON sont hermétiques l’un à l’autre. Parmi les militants, nombreux sont ceux qui ont été déçus par le résultat, par cette claque, comme l’ont même dit certains. Et j’en ai aussi fait partie. Les premiers chiffres ont eu un goût amer. Hier. Nous espérions pouvoir gagner la première fois, nous souhaitions au moins passer le cap des 30%. C’est sans doute là que résidait notre idéalisme, beaucoup plus que dans le fait de soutenir le RBI. Nous avons pensé en terme de OUI et de NON, comme le font aujourd’hui les opposants au RBi pour tenter de clore le débat et de se rassurer. Entre le OUI et le NON, il y a tout le chemin de la transformation sociale qui prend du temps, même si la première pierre est posée et bien posée.

En Suisse Romande nous avons eu l’idéalisme de penser pouvoir gagner. Mes pronostics personnels oscillaient entre 25% et 5o%. Je suis novice en politique, comme beaucoup des militants qui ont soutenu cette initiative. Aujourd’hui, je découvre le temps long, j’apprends la patience. J’apprends que la flamme ne s’éteint pas avec 23% de OUI, bien au contraire. Un peu plus de pragmatisme nous aurait sans doute évité de la déception, mais il nous aurait sûrement aussi fait ne pas nous engager autant! Nous avons porté avec coeur un projet de changement de société. Nous continuerons avec coeur à le porter, à informer et à débattre.

Au lendemain de cette votation, je sais de plus en plus clairement en quoi nous avons gagné cette première bataille et pourquoi la discussion que nous avons lancée ne fait que commencer. Nous avons gagné parce que maintenant que le revenu de base est entré dans la discussion publique, il va continuer d’être porté par les 570’000 personnes qui ont voté OUI et de cheminer comme une possibilité pour simplifier et adapter notre système de protection sociale aux besoins des personnes vivant et travaillant en Suisse. Nous avons gagné, parce la discussion suisse a été suivie avec passion depuis l’étranger. Nous avons gagné parce que le sujet est devenu un banal sujet de discussion et que l’on peut assumer de faire son coming-out pro RBI, même si ça reste encore un peu dur chez les PLR (on me racontait hier encore l’histoire d’une PLR qui avait voté OUI sans toutefois oser le dire à ses colistiers…). Nous avons gagné parce que même les citoyens ayant voté NON et interrogés à la sortie des urnes souhaitent que le débat continue et que des expérimentations soient lancées. Les discussions à venir sur l’avenir de la protection sociale ne seront plus jamais les mêmes et l’idée du revenu de base ne pourra que continuer de grandir.

Nous avons pu voir qu’au cours des trois derniers mois, le sujet a déchainé les passions, comme rarement votation l’a fait, en Suisse et dans le monde, éclipsant même les autres objets de votation. Les réseaux sociaux ont été hyperactifs. Après tout cela, l’idée du revenu de base fait désormais partie de notre imaginaire collectif et des solutions possibles pour mettre à jour notre système de protection sociale, à l’heure où le financement de l’AVS devient problématique et où les personnes inscrites au chômage et à l’aide sociale augmentent.

Certains opposants voudraient que cette votation enterre le RBI. On peut se dire à les écouter qu’ils n’ont peut-être pas grande conviction politique ou vision à long terme si leur seule ligne de mire est l’horizon électoraliste à court terme. Comme le disait hier Guy-Olivier Segond, ex conseiller d’Etat PLR : les politiques sont aujourd’hui des gestionnaires et ils ne savent plus être des forces de proposition pour l’avenir. On peut aussi rajouter qu’ils ont bien mauvaise mémoire quant à l’histoire des progrès sociaux en Suisse et dans le monde en enterrant si vite le RBI. L’AVS a demandé 3 votations, le congé-maternité a mis 50 ans avant d’être appliqué et le vote des femmes a dû être voté 3 fois avant d’être accepté par ces messieurs qui craignaient que l’économie ne s’effondrent.

Le mouvement suisse pour le RBI est bien vivant, il a grandi énormément au cours des trois dernières années, il ne va pas s’arrêter. Les actions citoyennes et de lobbying vont continuer. La Municipalité de Lausanne a accepté un postulat pour l’expérimentation d’un RBI, un des enjeux sera que d’autres municipalités ou cantons lancent également des expérimentations!

 

 

Le revenu de base peut-il rendre paresseux ceux qui le sont déjà?

La droite est bien contradictoire, prônant un libéralisme auquel elle ne croit en fait aucunement. Elle vient de l’illustrer magnifiquement aujourd’hui lors du débat sur le revenu de base sous la coupole, témoignant d’une vision de l’être humain empêtré dans sa paresse, son absence de responsabilité, son désir de profiter sans bouger le petit doigt.

L’être humain serait donc doté du gêne de la paresse. Et heureusement la droite est là pour l’en préserver! Je m’en vais prendre ma carte au PLR, histoire de contribuer à ce sauvetage collectif… Attendez, mais c’est pas un petit peu paternaliste pour un discours libéral?

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La droite a reproché au revenu de base d’inciter à la déresponsabilisation. Pourtant elle nous l’a dit elle-même tout au long de l’après-midi : le revenu de base ne peut pas fonctionner, car les gens sont paresseux, ils ont besoin d’une carotte et d’un bâton pour être actifs, de devoir gagner leur vie, donc d’être contraints d’accepter n’importe quel emploi. CQFD. Là, j’avoue, je ne comprends plus… Comment le revenu de base pourrait-il avoir le pouvoir magique de déresponsabiliser ceux qui, selon la droite, sont déjà irresponsables et paresseux et que seule la contrainte maintient dans le droit chemin? Mérite, effort, travail, ces valeurs fortes représentant la Suisse seraient donc en fait un chateau de cartes?

C’est triste : la droite vient de nous faire l’aveu qu’elle ne croit pas aux valeurs qu’elle prétend défendre, qu’elle y croit en fait bien moins que les défenseurs du revenu de base qui soutiennent la liberté des individus, leur capacité à s’auto-déterminer, leur désir d’entreprendre, de développer leur potentiel dans un travail qu’ils auront choisi, et donc de se responsabiliser.

“Tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité”, nous disait Hugo. La droite nous a dit  le contraire aujourd’hui.

Le jour où la femme d’Ueli Maurer a dit oui au revenu de base

Ueli_Maurer
Mes ami(e)s féministes peuvent remercier le Conseil fédéral, car je vais peut-être, grâce à lui, rejoindre leur rang. Et ce ne sera pas à cause d’Ueli Maurer et de sa consécration de la femme en tant qu’ustensile ménager tellement d’un autre temps que je ne pouvais qu’en rire, mais à cause de la prise de position exprimée par le Conseil fédéral sur l’initiative pour un revenu de base.

Je n’ai pas été surprise par son appel au rejet de l’initiative, je l’ai par contre été par sa manière d’argumenter la chose et de traiter les femmes : “plusieurs catégories de personnes n’auraient plus de raison financière d’exercer une activité lucrative, notamment les personnes qui gagnent moins de 2500 francs par mois ou à peine plus, c’est-à-dire les travailleurs à bas salaire ou à temps partiel, qui sont majoritairement des femmes.”

Les femmes ne travaillent que pour l’argent

C’est dit : les travailleurs à bas salaires et à temps partiel sont majoritairement des femmes et c’est très bien comme cela. Surtout ne changeons rien, car sans motivation financière les femmes déserteraient le monde du travail. On comprend soudain mieux pourquoi la femme d’Ueli Maurer n’a pas réussi à sortir de sa cuisine : c’est très certainement que monsieur lui paie un revenu de base. Heureusement, le Conseil fédéral est là, il veille et nous met en garde contre cet ovni politique qui pourrait donner naissance à une nouvelle vague de femmes ustensiles ménagers.

J’avoue, je me suis sentie un peu concernée… En tant que femme travaillant à temps partiel (avec un bas salaire de surcroit), je me suis sentie interpellée et méprisée par cette prise de position du Conseil fédéral. Je me suis demandée de quel droit les 7 sages pouvaient émettre sur ma personne et sur tout un tas de femmes un avis aussi péremptoire et reléguer ainsi dans une sous-catégorie ne méritant pas le revenu de base ou un salaire décent une écrasante majorité de la population.

Le Conseil fédéral affirme donc sans sourciller que beaucoup de femmes font un travail qu’elles n’aiment pas, qu’elles n’ont pas d’autre choix, que si elles avaient ce choix elles arrêteraient et que c’est donc une bonne raison de refuser un revenu de base. Cela témoigne de la volonté de conserver une partie de la population dans des conditions de vie précaire. Cela affirme également que toutes ces femmes ne travaillent que pour des raisons financières, ce en quoi je ne peux être d’accord.

C’est sans doute vrai que pour une partie des femmes la motivation financière n’est pas indifférente. La belle affaire! Qui ne fait pas son travail aujourd’hui aussi pour des raisons financières…? Qui n’a pas de loyers, d’assurance à payer, besoin de manger, se vêtir, se déplacer ou envie de s’acheter des choses agréables ou inutiles…?

C’est sûrement vrai aussi que pour certaines l’argent est une motivation importante, voire la principale, et qu’elles ne font pas leur travail par passion. Mais comment peut-on dire qu’avec un revenu de base elles ne travailleraient plus? Comment ne pas reconnaitre que toute activité, quelle qu’elle soit, nous apporte autre chose que de l’argent ?

Et que dire de toutes celles qui pour mille raisons différentes aiment ce qu’elles font et ce qu’elles sont dans leur travail? Il y a beaucoup de raisons autres que financières qui poussent à délaisser les fourneaux : l’envie de se réaliser, l’envie de voir du monde, d’échanger, partager, le besoin de se sentir utile, de contribuer, de créer, d’inventer, l’envie de donner (oui, il y a même des femmes qui ont envie de s’occuper d’autres personnes que de leurs enfants), l’envie de développer ses compétences, de les partager, l’envie d’apprendre. Rajoutez tout ce que vous voulez à la liste…

Les femmes, championnes du travail non rémunéré

Les femmes sont championnes du travail à temps partiel et aussi du travail non rémunéré lorsqu’il y a des enfants dans un ménage (selon l’OFS), tandis que les hommes pour la plupart travaillent à plein temps (c’est donc le temps partiel des femmes qui rend possible le plein temps des hommes). Elles sont aussi majoritairement celles qui s’occupent d’un parent âgé. Dans ces contextes, un revenu de base représente une valorisation et une reconnaissance de ce temps donné et indispensable au fonctionnement de la société, à son lien social et qui ne se traduit pas seulement en points de PIB, même si on sait que ces activités en sont le socle en rendant possible les autres activités économiques.

Avec un revenu de base, certaines (et certains!) pourront peut-être enfin faire sereinement le choix de ralentir et de penser à eux pour ne pas partir en burn out, de s’occuper pour un temps complètement (ou à temps partiel, mais sereinement) de leurs enfants, de leur parent, sans se sentir étrangler financièrement. Des activités essentielles à la société, au maintien du lien social, qui demandent du temps, de la disponibilité, de l’énergie, mais qu’il faut souvent accomplir en courant…

Le revenu de base donne le choix

Si le Conseil fédéral note que les bas salaires sont majoritairement féminins, il pourrait aussi avoir la noble intention non pas de cantonner les femmes dans ces bas salaires, mais de leur ouvrir des perspectives. C’est ce que fait un revenu de base en permettant de concilier mieux les différents temps et espaces de la vie que sont vie de famille, parcours de formation, vie professionnelle et temps libre. Loin de cantonner à la maison ou dans un bas salaire, le revenu de base donne la possibilité d’évoluer, de commencer ou de reprendre une formation. Il peut donner le temps et l’espace pour changer de cap, réaliser ses rêves, s’engager dans une nouvelle direction, qu’il s’agisse de devenir garde forestière ou infirmière.

Dans quelques années, je le souhaite, on pourra entendre ce témoignage de Jocelyne : “A partir du moment où j’ai eu mon revenu de base, j’ai pu arrêter de courir dans tous les sens, entre les enfants, le travail, les courses… J’ai pu enfin me poser et me demander ce que je voulais vraiment faire de ma vie. Et là, comme financièrement c’était possible, j’ai décidé de me lancer. J’ai toujours voulu être infirmière, mais comme j’ai dû commencé à travailler jeune, j’avais dû renoncer. Je me disais dans un coin de ma tête, plus tard peut-être, quand les enfants seront grands et qu’on aura besoin de moins d’argent pour faire bouillir la marmite… Et là (grand sourire de Jocelyne) eh bien, j’ai enfin pu me lancer…!”

J’espère pouvoir demain rencontrer Jocelyne et toutes les autres, et tous les autres.

Il n’y a pas une femme, il y a des femmes. Il y a une diversité d’êtres humains à qui le revenu de base peut donner de vrais choix.

 

PS: Et, entre nous, lors de l’introduction d’un revenu de base dans la ville de Dauphin au Canada, on a observé une légère hausse du taux de divorces, mais ne le dites pas à Mme Maurer…